Critique
d’une critique
La vie d’un livre autoédité tel
que Corliande est un parcours semé d’embûches, comme tout parcours qui se
respecte. Après moult difficultés propres à sa publication, voici venu le temps
des critiques. La première à apparaître sur un blog dit littéraire ne m’a, je
vous l’avoue, pas vraiment comblée de joie. Alors, c’est la règle du jeu me
direz-vous. Bien sûr, et je la respecte. Néanmoins, si je ne m’exprime qu’assez
rarement sur internet, je suis moi-même blogueuse. Je ne me priverai donc pas
d’exercer une sorte de droit de réponse. J’espère qu’il ne m’en sera pas fait
reproche. Après tout, c’est de bonne guerre.
Sur son blog Bookenstock,
Phooka a ainsi publié une critique de Corliande. Celle-ci lui avait été
demandée par les administrateurs du site Les agents littéraires
suite à l'envoi de ma trilogie. Conformément à leur préconisation, j'ai dû faire
parvenir un autre exemplaire de chacun des trois livres à cette blogueuse dont
je ne connaissais ni le pseudo, ni à fortiori les goûts, n'ayant aucun moyen de
savoir sur quel blog elle écrivait. Un mot concernant les agents littéraires.
Il s'agit d'un site dont l'objectif est de faire chroniquer par différents
blogueurs indépendants des ouvrages de petits éditeurs peu connus du grand
public, voire autoédités. Sous l'en-tête du site on peut lire "mobilisés au service des livres peu
médiatisés". Cette entreprise est fort louable, et loin de moi l'idée
de remettre en cause la sincérité de leur démarche.
Cependant, comme je le
craignais, le soin de critiquer mon livre a été confié à une amatrice d'héroic
fantasy, qui semble priser beaucoup l'action (au sens qu'a ce terme aujourd’hui,
à savoir vitesse et violence… alors qu’il existe tant d’autres formes
d’action !). Or comme je l’ai dit plus haut dans un précédent article,
Corliande n’est pas tout à fait de
l’héroic fantasy. J’ai beau faire, en effet, je n’arrive pas à me reconnaître
dans cette définition. Une fois de plus, je me sens quelque peu victime d’un
choix arbitraire, sans même pouvoir me retourner contre d’éventuels « coupables ».
Car la détermination du public associé à tel type de livre implique une
simplification à l’extrême, dont nul n’est à blâmer en particulier. Difficile de sortir des sentiers battus, on
vous y reconduit dès les premiers pas ! C’est ainsi que je me retrouve jugée
par une personne tout à fait respectable, sans aucun doute, mais dont mon style
n’est hélas pas « la tasse de
thé ». C’est bien ma chance ! On ne choisit ni ses lecteurs ni
ses chroniqueurs, me direz-vous, et c’est un risque qu’il faut accepter.
Là encore, mon intention n’est
pas de me faire une ennemie de Phooka, laquelle a parfaitement le droit de ne
pas aimer mon travail. Sa chronique n’est d’ailleurs pas entièrement négative,
loin s’en faut. Elle admet qu’il s’agit d’un « beau livre », et que « Tout ceci est raconté avec beaucoup de poésie. » Elle le
trouve très « visuel ».
Passons sur son opinion qu’il « aurait
donné une magnifique BD ou un film à l’esthétique recherchée » et qu’elle a « beaucoup pensé au
début de Legend de Ridley Scott par exemple » encore que, pour ma
part, je ne vois pas pourquoi un livre devrait devenir une BD et n’ai pas franchement
aimé le film en question (Tant qu’à faire, j’aurais préféré Dark
Crystal !). Elle le présente comme un « petit récit initiatique ».
Petit ?... Ce n’est que la première partie d’un conte de plus de huit
cents pages ! Mais il est vrai que, comme je le craignais aussi, elle
s’est arrêtée au livre I, malgré ma recommandation aux agents littéraires de
bien considérer Corliande comme un tout. Le fait qu’elle ait trouvé le début
« totalement incompréhensible et
obscur et qui risque, à mon avis, d’en décourager plus d’un. Dommage », confondant au passage,
je présume, prologue et premier chapitre, me laisse évidemment perplexe.
J’ai dû manquer mon effet. Je le voulais juste assez mystérieux pour que l’on
ait envie d’aller au bout de la lecture afin d’en trouver l’explication. C’était
peut-être trop ambitieux, trop « littéraire », je ne sais pas. Ce n’est
peut-être tout simplement pas réussi. Face à cette incompréhension, je ne
saurais dire qui a raison. Mais ce que
je trouve dommage, moi, c’est de décréter à l’avance que certains lecteurs vont
être découragés. Qu’ils se rassurent ! Grâce à cette mise en garde, ils
n’auront même plus besoin de tenter l’expérience ! Quant au souci que
j’ai exprimé par rapport au livre I, ce petit malentendu me donne aussi l’occasion
de faire mon autocritique. Je suis de plus en plus convaincue que le fait de l’avoir
édité sous la forme de trois volumes séparés était une erreur. J’ai longtemps
hésité à le faire. Certains me le conseillaient, d’autres pas. Mais je dois dire
pour ma défense que Lulu.com ne peut imprimer un ouvrage de plus sept cents
pages, alors…
Phooka dit également que le
« le monde créé par Isabelle Nuffer
est original et attise la curiosité. » raison pour laquelle « je jetterai sans doute un œil sur le tome 2,
histoire de savoir si le style et le rythme change (…) Si non, alors
j’arrêterai là cette aventure. » Là nous en venons à l’aspect vraiment
négatif de sa chronique. Visiblement mon style ne lui plaît pas trop (malgré la
beauté et la poésie ?). Mais c’est surtout le rythme qui lui pose un
problème. Les mots qu’elle emploie sont à ce titre plutôt durs et péremptoires,
à mon avis, suffisamment
en tous cas pour faire brutalement pencher la balance du mauvais côté. Elle le trouve « assez
ennuyeux », juge qu’« il ne se passe rien ou presque pendant tout
le roman » et ajoute « Oui
je sais c’est un peu méchant de dire ça, allez-vous me reprocher, mais il se
trouve que c’est quand même la vérité. » Diable ! Elle sait donc
ce qu’est la vérité ? Pourtant ne se contredit-elle pas, un peu plus loin,
en énonçant que « Nos deux jeunes héros
se promènent dans cette région étrange en y découvrant toutes sortes de
créatures et de paysages, tous plus intrigants les uns que les autres. » et que « Les deux ados vont aller de découvertes en découvertes et leur naïveté
va leur ouvrir bien des portes. » ? Que devrait-il se passer pour susciter l’intérêt de ma lectrice ?
Hélas, je ne le sais que trop. « J’attendais un peu plus d’aventures et un peu moins de contemplation. »
nous dit-elle. Outre que le fait d’attendre quelque chose de précis lorsque
l’on ouvre un livre, qui plus est d’un auteur inconnu, entraîne au pire la
déception et au mieux le risque de passer à côté d’une vraie surprise, je ne
pense pas qu’il ne s’agisse ici que de contemplation. Les aventures de Baltos
et Serylia face aux dieux rampants et volants, aux araignées, aux chimères, ne
sont certes pas très spectaculaires. Elles sont surtout l’occasion pour eux de s’interroger,
de réfléchir sur eux-mêmes et, parfois, d’en tirer un enseignement. Peut-être
eût-il été préférable que mes héros soient un peu plus bousculés, violentés,
torturés, voire laissés pour morts ? Je me souviens d’un lecteur à qui mon
livre avait été soumis, et qui trouvait qu’il était bien écrit, mais que mes
personnages n’étaient pas assez « malmenés ». Manifestement, il y manquait
pour lui quelques bonnes scènes de combats bien sanglantes ! S’agit-il
aussi de cela, dans ce cas précis ? J’ai déjà eu l’occasion de dire ici que
l’absence de violence était un parti pris, et je le revendique. Certains l’ont
d’ailleurs approuvé. Phooka elle-même dit être « sûre que d’autres apprécieront ce type de lecture » Je
l’espère vivement. Et j’espère aussi qu’ils le feront savoir, car pour
l’instant, malheureusement pour Corliande, c’est bien elle qui a rédigé la
critique. Mais si j’ai été déçue par la formulation un peu cruelle de son
« ressenti », et si je pense que les termes utilisés ont de quoi
décourager bien des lecteurs (probablement plus que mon prologue) je ne lui en
veux pas, bien entendu. Je vais même la remercier pour avoir pris la peine de
lire mon livre et de l’avoir trouvé, malgré tout, non dénué de qualités. Si
vraiment elle jette un œil sur le livre II, souhaitons qu’elle le trouve moins
linéaire, plus mouvementé et plus distrayant. A suivre donc… peut-être.
Je n’ai pas vu cette chronique
sur le blog des agents littéraires et j’ignore pourquoi. C’est tout de même à
eux que j’avais adressé mon livre. Peut-être est-ce un peu tôt, mais Phooka
ayant quant à elle publié son texte dès jeudi dernier sur son propre blog, je
tenais à réagir rapidement, sachant que tout va toujours très vite sur
internet. Je n'ai pas encore eu non plus de réponse au courriel que je leur ai
envoyé. J'attends donc de leurs nouvelles, mais d'ores et déjà, j’ai bien peur
que la mobilisation « au service des livres peu médiatisés » n’ait
pas fonctionné en ce qui me concerne.
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Je viens de lire la critique de Phooka, justement, sur ton livre. Quand on envoie son livre pour qu'il soit lu, il faut s'attendre à toute sorte de retour de la part de ceux qui l'ont lu. Tu peux qualifier ton histoire de "conte initiatique" ou autre, mais tu ne pourras jamais le faire clairement comprendre à celui qui aura le livre entre les mains au moment de l'acheter. Pour toi comme pour celui qui va l'acheter, on mise toujours beaucoup sur la lecture du livre. Il faudra toujours passer par quelques déceptions et accepter la critique, ça fait partie du jeu. Et sois contente qu'elle l'ai lu en entier malgré le fait que ce ne soit pas "sa tasse de thé". D'autres blogueurs auraient carrément abandonné dès le début ! Et quand tu dis qu'elle n'était pas le public visé, si je m'étais contenté de ne lire que ce qui m'intéressais, je n'aurai jamais découvert des auteurs qui me sont chers maintenant !
RépondreSupprimerToute critique est bonne à prendre, et il faut savoir rebondir dessus pour s'améliorer :)
Bonsoir Emma,
RépondreSupprimerMerci pour ton commentaire. Je ne crois pas avoir donné l'impression que je n'acceptais pas la critique. Je voulais juste y répondre. La critique aussi peut être contestée. Et toute personne qui écrit, sur un blog ou autre, se doit aussi d'accepter les commentaires et les contre critiques. Pour ma part, je ne veux parler que de mes coups de cœur, mais tout le monde ne voit pas les choses sous cet angle. Et c'est sans doute très bien ainsi. Quant au fait qu'elle l'ait lu en entier, je crois bien l'avoir déjà remerciée, et m'être dite navrée que cette lecture l'ait ennuyée. Je le pensais vraiment. Rebondir, c'est précisément ce que je viens de faire. Et j'espère ne jamais cesser de m'améliorer